mardi 21 juillet 2009

la stratégie de la destabilisation

Cela fait bientôt neuf ans que la République démocratique du Congo est dirigée par Joseph Kabila. Le moins qu’on puisse dire est que ce pays est mal gouverné. Les signes de cette mauvaise gouvernance se traduisent d’abord par l’absence criante d’un véritable projet politique s’articulant sur des objectifs clairs à court, moyen et long terme. Des objectifs devant faire l’objet d’une évaluation périodique afin d’apprécier l’efficacité des actions. Les «Cinq chantiers» constituent tout sauf un projet politique. La réfection de quelques rues de la capitale ne peut être assimilée à une vision. Les signes de cette mauvaise gouvernance se traduisent ensuite par l’absence de la paix civile, d’une ambiance libérale et enfin par l’obsession des gouvernants à se tromper des priorités : les intrigues politiciennes occupent l’essentiel du temps au détriment de la recherche des réponses à donner aux attentes de la population. Du mois de janvier à mars dernier, la vie politique en RD Congo était comme suspendue. En cause, le bras de fer Kabila-Kamerhe qui a abouti à la décapitation du Bureau de l’Assemblée nationale. Officiellement, le «raïs» n’aurait pas apprécié les critiques formulées par Vital Kamerhe après l’intervention des forces régulières rwandaises sur le sol congolais dans le cadre de l’opération «Umoja wetu». Officieusement, l’homme et son entourage n’appréciaient plus que modérément la liberté de ton autant que d’initiative perceptible au sein de la Chambre basse du Parlement. Une Chambre basse qui avait mis sur pieds, en novembre de l’année dernière, une dizaine de commissions chargées d’«auditer» des entreprises et établissements publics. C’est le cas notamment de la Banque centrale du Congo. Exit donc «Vital» et son équipe. Un nouveau Bureau, plus docile, a pris la place. A sa tête, Evariste Boshab qui n’est autre que le secrétaire général du parti présidentiel (PPRD). La «discipline» est ainsi restaurée. Adieu, les commissions d’enquêtes. Au mois de mai et juin de l’an en cours, l’opinion nationale a été tenue en haleine par l’échange de correspondances entre le Premier ministre Adolphe Muzito et Joseph Kabila ou plus précisément avec le directeur du cabinet présidentiel Adolphe Lumanu. «(…). J’ai l’honneur, écrivait le directeur du cabinet présidentiel, de vous informer que sur instruction de la «Haute hiérarchie», désormais, tout ordonnancement des dépenses publiques devra, avant paiement, requérir l’autorisation préalable de son excellence Monsieur le président de la République.» Le chef du gouvernement congolais à qui la Constitution confère la prérogative de gérer le pays au quotidien – et d’en rendre compte devant les élus de la nation – est dépossédé de ce pouvoir par un chef d’Etat politiquement irresponsable. Muzito ayant courbé l’échine, une crise au sommet de l’Etat a été évitée de justesse. Il reste que le mal est fait à la «démocratie congolaise». En dépit des apparences, le duo Kabila-Muzito n’est plus viable. Un climat malsain s’est installé au sommet du pouvoir d’Etat. Au fil du temps, «Joseph» a réussi à phagocyter ses «partenaires» politiques. Il se considère désormais comme le seul maître du jeu. Il attend désormais de l’«obéissance» et de la «discipline» de la part de ses «amis» politiques d’hier en l’occurrence le Palu d’Antoine Gizenga et l’Udemo de François-Joseph Nzanga Mobutu. Kabila a compris que ses prétendus partenaires sont réduits au rang de pique-assiettes, prêts à subir tous les outrages pourvu qu’ils gardent une place au «réfectoire» national. On raconte à Kinshasa que le personnel de l’O.C.C (Office congolais de contrôle) est passé de 3.500 unités à 5.000. Des recrutements massifs auraient eu lieu au profit des militants du Palu et du PPRD…Alors que le bras de fer Kabila-Kamerhe et l’échange épistolaire entre le Premier ministre Muzito et la «Haute hiérarchie» sont encore frais en mémoire, voilà que le «raïs» prend la mesure spectaculaire et démagogique de révoquer, de retraiter et de démettre d’office des magistrats tant du Parquet que du Siège. D’autres sont nommés. Le «raïs» invoque notamment la «corruption» et la «concussion» pour justifier ses ukases. Les magistrats sanctionnés sont décidés à vendre chèrement leur peau. Des recours gracieux sont en cours d’introduction. En cas d’insatisfaction, les intéressés sont déterminés à saisir les juridictions internationales. On s’achemine vers un bras de fer épique entre la Présidence de la République et la magistrature. En réalité, sous prétexte de "réformer", le chef de l’Etat veut caporaliser ce grand corps de l’Etat à l’image de l’Assemblée nationale. Il ne lui reste plus qu’à assujetir le Sénat pour revendiquer le titre de «dictateur».Qui cherche à détourner l’attention de la population congolaise de véritables enjeux du moment? La RD Congo a-t-elle franchement besoin de gaspiller tant d’énergie dans des crises dérisoires au moment où son unité physique se trouve menacée à travers l’étrange guerre qui oppose les FARDC à des groupes armés dans les provinces du Kivu mais aussi dans la Province orientale ? Qui a intérêt à déstabiliser les institutions nationales en entretenant un climat permanent de tension ?A quel jeu se livre Joseph Kabila ?
B. Amba Wetshi © Congoindépendant 2003-2009

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